Entre 1520 et 1600, la population indienne du Mexique s’effondre de plus de 90%. En 1619, les premiers esclaves noirs arrivent en Virginie. En 1624, les Hollandais fondent la Nouvelle-Amsterdam sur l’île de Manhattan. En 1750, l’Amérique « française » s’étend de la Nouvelle-Orléans à Québec en passant par le pays des Illinois et les Grands Lacs. En juillet 1776, des franciscains espagnols fondent une mission à San Francisco, au moment même où la Déclaration d’Indépendance est signée à Philadelphie. L’histoire de l’Amérique du nord du 16e au 18e est d’abord une histoire de contacts entre peuples et pays des deux rives de l’Atlantique, et au-delà : amérindiens, européens, africains.
Après la phase de découverte, vient le temps de la conquête et des implantations espagnoles, françaises, anglaises, hollandaises. De l’exploitation économique à l’évangélisation, les modes de contacts sont divers. Des sociétés coloniales se structurent, avec des traits communs, mais aussi de profondes différences, par exemple dans les relations avec les Amérindiens et entre groupes ethniques (présence ou non de métissage). Trois « empires » dominent et entrent en rivalité : le 18e siècle voit successivement la disparition de l’empire français, puis le bouleversement de l’Amérique anglaise, où l’émergence du Canada ne compense pas l’indépendance des Etats-Unis. Quant à la domination espagnole au Mexique, elle est en sursis. Et une large partie de l’espace américain reste encore contrôlée par les Amérindiens. Finalement, c’est à l’échelle de l’Atlantique qu’il faut observer la situation, pour mieux mesurer les interdépendances (politiques, économiques ou culturelles) d’un territoire à l’autre, d’un « empire » à l’autre, d’une rive à l’autre.
A la fin du Moyen Age (XIVe-XVe siècle), toutes les autorités constituées - des papes aux empereurs en passant par les rois ou les cités-états indépendantes - ont recours aux prestiges de l’image. Le pouvoir en représentation emprunte alors les supports les plus divers, des monnaies aux tapisseries, en passant par les manuscrits ornés, les peintures murales et bientôt de chevalet, les sculptures funéraires ou encore les médailles. L’inflation considérable de l’imagerie politique, la variété de ses supports comme le renouvellement de ses formes (« inventions » du portrait, de la perspective mathématique, etc.) témoignent de l’importance inédite accordée aux pouvoirs de l’image. Centré sur l’étude des rapports entre images et pouvoirs, ce cours s’organise autour d’un double questionnement. En premier lieu, il s’agira de déterminer quels sont les motifs et les moyens de l’appropriation de l’image par le pouvoir. Comment et pourquoi certains pouvoirs produisent-ils des représentations d’eux-mêmes ? En second lieu, on s’interrogera sur les pouvoirs de l’image : comment le dispositif représentatif exerce-t-il une emprise sur les esprits, signifie-t-il une puissance ? Les images ont-elles vraiment une efficacité politique ?
Indispensable au métier d'historien, le déchiffrement des écritures anciennes ne s'improvise pas. Envisagée ici en tant que science auxiliaire de l'histoire, la paléographie vise à déchiffrer les textes manuscrits (en langue française) antérieurs (ou contemporains) à la diffusion de l'imprimerie. Le cours se conçoit comme une initiation à la paléographie française (XIVe-XVe s.) en même temps qu'à une histoire des écritures en usage dans l'Europe occidentale (du IXe au XVe s). Il s'intéressera aussi à la matérialité du livre médiéval en abordant quelques notions de codicologie.

[Objectifs: acquisition d'une compétence technique dans le déchiffrement des écritures anciennes - initiation à la recherche sur des sources originales manuscrites - accès aux archives - découverte d'un objet : le livre médiéval]
L'importance prise par l'image dans notre propre société a rendu l'historien plus attentif aux problèmes soulevés par les formes et les fonctions des représentations figurées au cours de l'histoire. L'Europe médiévale occupe une place importante dans l'histoire longue de l'image en Occident: contournant le vieil interdit biblique pesant sur l'image - "Tu ne feras pas d'idole" - le Moyen Age occidental n'a pas hésité à produire de nombreuses représentations figurées, y compris, et peut-être surtout, du dieu incarné. Par-delà la présentation d'un certain nombre d'images caractéristiques de cette période, ce cours vise à familiariser les étudiants avec les méthodes d'analyse propres à l'image médiévale en tant que celle-ci n'est ni un "objet d'art", ni une simple illustration des textes.
C’est par dizaines de milliers que sont parvenues jusqu’à nous les images sur vase, source iconographique majeure pour notre connaissance de la Grèce ancienne : scènes de femmes puisant l’eau à la fontaine, de jeunes athlètes s’entraînant au gymnase, d’hommes festoyant au banquet, de familles prenant part à un cortège matrimonial, scènes de sacrifice ou de théâtre, scènes de guerre et scènes d’amour, dans ces images, les Grecs représentent des pans entiers de leur vie sociale. À travers une analyse de cette documentation, de ses principes et des contraintes qui lui sont propres, on abordera la culture visuelle des Anciens, la manière dont les images sont construites et agencées, le discours et la symbolique qu’elles véhiculent, résultat des intentions des peintres autant que des attentes des propriétaires.
En prenant appui sur les cours précédemment suivis par les étudiants sur l’historiographie et l’histoire de l’histoire, cet enseignement de sciences auxiliaires portera sur la place de la discipline historique parmi les sciences humaines et sociales. Dans quelle mesure l’histoire en est venue à faire partie des « sciences sociales » telles qu’elles se sont constituées depuis la fin du dix-neuvième siècle ? Ces disciplines, séparément ou comme un ensemble aux contours incertains, prétendent expliquer comment les communautés humaines tiennent et interagissent, et rendre compte des comportements individuels en société. Leurs démarches sont parfois ouvertement opposées ou contradictoires entre elles. Quant à la place qu’y tient l’histoire, il n’existe aucun consensus, comme il n’y a pas d’accord non plus sur la proximité plus ou moins grande de l’histoire avec telle ou telle discipline des « sciences sociales ». Les relations entre ces disciplines ont elles-mêmes une histoire complexe au long du vingtième siècle, et le cours en retracera certains des moments et problèmes les plus importants.
Cet enseignement méthodologique consiste dans la présentation et l'analyse des sources privilégiées par les historiens afin d’étudier les questions internationales, à l’époque contemporaine, depuis la France, en prenant en considération les ressources locales (bibliothèques municipales, archives départementales, celles de l'Internet, et tout particulièrement les archives diplomatiques conservées à Nantes au CADN ). Les premières séances portent sur les « dépêches consulaires », notamment disponibles au CADN, afin d'étudier les pratiques diplomatiques et d’appréhender les différentes approches et méthodes que les historiens mettent en œuvre pour les étudier. La seconde partie du cours confronte des sources de natures différentes afin de travailler sur des événements, crises internationales, crises intérieures, actions diplomatiques : correspondances diplomatiques, discours officiels, télégrammes d'ambassade, rapports des services de renseignement, presse, médias afin de tester les méthodes d'analyse, pour évaluer les niveaux d'information et comprendre les processus de prise de décision au sein des chancelleries.
L'ensemble des séances porte sur les relations internationales en Amérique latine.
Dans la perspective des études dites « postcoloniales » et « de subalternes », il s’agit d’aborder l’histoire sociale et culturelle de l’Amérique latine à partir de la relation que les minorités culturelles, tout particulièrement les populations amérindiennes et afro-descendantes ont entretenu avec les États-nationaux à l’époque contemporaine. Partant de la construction des États-nationaux selon un modèle unitaire à la fin du XIXe siècle, le cours interroge la trajectoire historique de ces populations pour comprendre la convergence relative des sociétés d'Amérique latine vers le multiculturalisme, voire vers la construction d'États revendiqués « plurinationaux », notamment en Bolivie et en Équateur, au début du XXIe siècle. On insistera sur les grands moments et les conjonctures qui ont marqué cette histoire du sous-continent en tant qu’aire culturelle, mais aussi sur les circulations et les transferts d’expérience qui ont pu se produire à l’échelle continentale.
De la conversion du roi wisigoth Reccarède au catholicisme en 587 à l’expulsion des derniers mozarabes au XIIe siècle, la péninsule Ibérique fut le terrain de rencontres entre différentes cultures, religions et sociétés.
Dans le contexte historiographique d’une remise en question de la réalité du mythe de la convivencia entre les trois religions monothéistes après 711, cet espace offre un cas d’étude intéressant pour étudier les formes de cohabitation de différentes communautés et systèmes religieux.
En adoptant une fourchette chronologique longue, le cours permettra de remettre en perspective la portée de la conquête islamique et d’envisager sur la longue durée certaines thématiques dont l’antijudaïsme, les contacts et échanges culturels, les processus d’acculturation religieuse, la survivance ou la résurgence de croyances et pratiques hérétiques, la perception de l’autre, etc. Si l’implantation de l’islam a longtemps été perçue et pensée dans l’historiographie comme une rupture, la dimension religieuse de la conquête de 711 et la progression de l’islamisation parmi les chrétiens a fait l’objet d’importantes réévaluations dans l’historiographie qui seront plus particulièrement l’objet d’une présentation.
À l’époque moderne, la cour est un lieu de pouvoir, qui permet de resserrer les liens entre le cœur de l’État et les provinces. C’est aussi une micro-société, où se côtoient de nombreux courtisans, attirés par la faveur royale. C’est enfin un foyer culturel, où travaillent les plus grands artistes, de Florence à Londres et de Madrid à Paris. Depuis son essor au XVe siècle, jusqu’à la fin du XVIe siècle, cet enseignement explore la civilisation de cour dans l’Europe de la Renaissance, en s’appuyant de manière importante sur les innombrables œuvres d’art qu’elle a engendrées, notamment les peintures.
De l’impérialisme hégémonique des études postcoloniales à l’empire comme simple « projet » (J. Darwin), la dimension impériale du colonialisme européen continue à faire débat. Qu’est-ce qu’un empire ? Quelles en sont les manifestations, matérielles ou symboliques ? Peut-on comparer des « formations impériales » aussi différentes que les empires coloniaux français, anglais ou hollandais ? À partir d’études de cas, cet enseignement cherche à sonder ce que fut la réalité des empires ouest-européens en Afrique et en Asie, le champ de leur domination ainsi que les différentes stratégies de résistance des populations colonisées. Si l’on prend en compte la définition des empires donnée par J. Burbank et F. Cooper, à savoir « une entité politique expansionniste maintenant les distinctions et les hiérarchies à mesure qu’elles incorporent de nouvelles populations », il semble que toute enquête sur l’empire doive nécessairement intégrer cette tension permanente entre différenciation et intégration. Il conviendra dès lors d’appréhender les étapes de mise en place, dès la première moitié du XIXe siècle, de « sociétés coloniales » à Java, en Inde ou en Algérie, fondées sur des formes plus ou moins élaborées de ségrégation et d’exclusion ainsi que sur un racisme structurel. Par ailleurs, du « partage de l’Afrique » de la fin du XIXe siècle jusqu’au partage du Moyen-Orient arabe dans l’entre-deux-guerres, nous interrogerons la consistance et l’effectivité même du concept d’empire tel qu’il se manifeste à travers les guerres, les circulations transnationales et la recherche d’un impossible consensus impérial.

Lectures conseillées : R. BERTRAND, Etat colonial, noblesse et nationalisme à Java. La Tradition parfaite, Paris, Karthala, 2005 ; J. FREMEAUX, Les empires coloniaux. Une histoire-monde Paris, CNRS Editions, 2012 ; J.-L. MARGOLIN ET C. MARKOVITS, Les Indes et l’Europe. Histoires connectées (XVe-XXIe siècles), Paris, Gallimard, 2015; P. SINGARAVELOU (DIR.), Les empires coloniaux XIXe-XXe siècles, Paris, Le Seuil, 2013 ; H. WESSELING, Les empires coloniaux européens (1815-1919), Paris, Gallimard, 2009.
« Être gouverné », écrivait Proudhon en 1851, « c’est être gardé à vue, inspecté, espionné, dirigé, légiféré, réglementé, parqué, endoctriné, prêché, contrôlé, estimé, […], censuré, commandé, par des êtres qui n’en ont ni le titre, ni la science, ni la vertu ». Celui que l’on désigne souvent comme le père de l’anarchisme se garde bien d’ajouter qu’être gouverné, c’est aussi, éventuellement, être protégé, secouru, instruit ou promu. La manière dont il formule sa critique de l’État n’en est pas moins précieuse. Proudhon délaisse en effet l’analyse institutionnelle et porte sa réflexion sur les effets concrets des pratiques de l’État dans la vie des citoyens ordinaires, « noté[s], enregistré[s], recensé[s], tarifé[s] » pour reprendre le fil, encore incomplet, de son long inventaire. Sur le même modèle, ce cours examinera la croissance de l’État – fait majeur dans l’histoire de l’Europe au XIXe siècle – à partir des interactions concrètes de celui-ci avec les populations du continent et de la présence de ses agents dans la vie quotidienne des Européens. Et l’on verra que ces serviteurs de l’État furent les premiers à être gouvernés au sens de Proudhon, c’est-à-dire à devoir adopter un certain comportement conforme à leur statut.
Bibliographie indicative : B. KAFKA, Le démon de l’écriture. Pouvoirs et limites de la paperasse, Zones sensibles, 2013 ; L. RAPHAEL, Recht und Ordnung. Herrschaft durch Verwaltung im 19. Jahrhundert, Fischer, 2000 ; P. ROSANVALLON, L’État en France de 1789 à nos jours, Le Seuil, 1990 ; C. TILLY (ed.), The Formation of National States in Western Europe, Princeton University Press, 1975.
Enseignant : P. Karila-Cohen
histoire de la culture matérielle en France à l'époque moderne, CM et Td
A. Chatenet-Calyste
CM et TD le mardi après-midi
Le cours est conçu comme une initiation à la recherche en histoire, en se focalisant sur l’apport des outils numériques. La notion de corpus est essentielle pour conduire une recherche sur une question historique, quelles que soient la période, la thématique ou l’approche historiographique envisagées. Le corpus peut être défini comme la sélection par le chercheur ou la chercheuse des documents qu’il ou elle choisit comme sources pour traiter d’une question historique précisément définie. Or, les outils numériques actuellement disponibles amènent une réflexion nouvelle sur la façon dont un.e historien.ne construit son corpus et le transforme en données de recherche, et ce, à toutes les étapes de collecte, de stockage et de traitement des documents qui peuvent être numériques ou non. Le cours consistera à guider chacun des étudiants sur une étude spécifique de corpus, choisie dans la liste offerte par les directeur.rice.s de mémoire, en initiant en particulier aux outils numériques de collecte et à la prise en main d’un tableur pour modéliser une base de données. Ces questions techniques relèvent en réalité d’une étude qualitative approfondie des documents disponibles pour traiter d’un sujet de recherche.
La théorie selon laquelle la Hongrie et les Hongrois auraient des origines et un caractère profondément asiatiques retrouve aujourd’hui de la vigueur, au sommet de l’État hongrois et dans les mouvements ultra-nationalistes, comme parmi les intellectuels et dans les milieux artistiques. Elle s’était déjà exprimée au XIXe siècle, dans le sillage du « printemps des peuples », où l’on cherchait à asseoir l’identité nationale sur des fondements historiques, ethnographiques et linguistiques. Elle prolonge la conviction des chroniqueurs du Moyen Âge selon laquelle les Hongrois, arrivés de la lointaine et mystérieuse Scythie, descendraient directement d’Attila et de ses Huns. Encadrée chronologiquement par la domination hunnique (Ve siècle) d’un côté et ottomane (après les victoires de Soliman le Magnifique en 1526 puis 1541) de l’autre, la Hongrie formait-elle vraiment une enclave asiatique au sein de l’Europe médiévale ? La réponse varie selon que l’on privilégie les données factuelles – événements et institutions politiques, processus sociaux, productions culturelles, croyances et pratiques religieuses, etc. – ou bien leurs mises en récit successives.
Espace ressource pour le TD 1 (H.ORAIN) de L3 parcours sciences politiques - Histoire moderne sur la Révolution française